08 février 2017

Le Prophète Muhammad (PSL) était-il analphabète ?




Le prophète, illettré ?



Le prophète Muhammad (PSL) dans certaines sources du Coran et des hadiths est qualifié « d’illettré », c’est-à-dire, « ne sachant ni lire ni écrire ». Le dialogue avec l’ange Gabriel le montre. Des islamologues qui ont travaillé le sujet soulèvent la difficulté de la traduction « Oummi » qui ne veut point dire « analphabète ».

Les biographes du prophète mentionnent bien le fait que le Prophète, naît dans une tribu de lettré, n’a malheureusement pas été instruit. Telle est la volonté de Dieu, de l’avis du Dr Tariq R. De la même manière, les savants musulmans ont toujours mis en avant son illettrisme pour sublimer sa connaissance paradoxale des traditions juives et chrétiennes.
« Quoi qu'il en soit, je ne pense pas que cela soit si important ... illettré ou pas, il est clair qu'il n'a jamais fréquenté les écoles religieuses juives ou les séminaires chrétiens, les seuls lieux où l'on pouvait à cette époque acquérir une connaissance théologique et scripturaire véritables. Et encore, pas le savoir diffusé par les centres périphériques, mais celui des grandes académies juives irakiennes par exemple, ou les facultés de théologie d'Alexandrie et d'Antioche ...
Or il est clair que le monde des caravaniers mekkois était bien loin de tout cela ... pourtant, c'est là et nul par ailleurs que l'on a affirmé pour la première fois avec tant d'évidence que Dieu est Un et que cette unité engendre un certain nombre de conséquences pratiques pour le destin de chacun ...

En 610 à Constantinople, on préférait se battre entre monothéistes et chalcédoniens pour savoir si Dieu avait deux natures, humaine et divine, subordonnées ou pas l'une à l'autre. À Pumbedita, le grand centre du savoir talmudique, on débattait pour savoir si tel rabbi avait ou n'avait pas prononcé telle phrase de telle façon sur l'importance ou non de la pureté rituelle dans la récitation de telle ou telle prière basée sur tel ou tel commentaire de tel verset, etc… » 
Je reprends ici quelques éléments de recherches pour éclairer et susciter la curiosité. Ma volonté n’est nullement de trancher le débat. Mes recherches m’ont permis de découvrir à tel point le Prophète Muhammad (PSL) durant sa tendre jeunesse a voyagé, échangé avec beaucoup de lettrés, a eu écho de beaucoup d’histoires et de controverses. Il était berger à l’image de tous les prophètes et a eu le temps de méditer. Il était imprégné de toutes les traditions. Zayd son fils adoptif connaissait le cœur de la mystique juive.

Le mot « Ummi » (souvent traduit « illettré ») est  utilisé à plusieurs reprises dans le Coran. Les assertions de certains orientalistes et/ou missionnaires chrétiens se basent également sur certains Hadiths authentiques rapportés par Al-Bukhârî et Muslim.


Le premier Hadith


Pour ce qui est de montrer que le Messager de Dieu était illettré, une première évidence est trouvée dans le rapport d'Aïcha au sujet du début de la Révélation et l'apparition de Gabriel dans le mont Hirâ’.

Aïcha, l'épouse du Prophète, a dit :

« La Révélation se présenta d'abord au Prophète (paix et bénédiction de Dieu sur lui) sous forme de visions pieuses qu'il voyait pendant son sommeil. Toutes lui parurent avec une très vive clarté. Puis, il eut de l'inclination à la retraite. Il se retirait alors dans la caverne de Hirâ', où il se livrait à la pratique d'actes d'adoration durant des nuits consécutives, avant qu'il ne rentre chez lui pour se munir de provisions de bouche. Il revenait ensuite vers Khadîja et prenait les provisions nécessaires pour une nouvelle retraite. Cela dura jusqu'à ce que la Vérité lui fut enfin révélée dans la caverne de Hirâ'. L'archange y vint alors lui dire : « Lis! ». - « Je ne suis point de ceux qui lisent », répondit-il. »
(propos rapportés par Sahih Muslim, n° 231)

Quand l'ange a ordonné à Muhammad de lire (« sallâllâhou alayhi wa salam »), celui-ci a compris au départ que l'ange voulait qu'il comprenne la signification d'un texte écrit (qui est un des sens du verbe « lire »). Ce qu'il ne pouvait pas faire.

C'est la raison pour laquelle il a répondu « Ma ana bi qari'in », c’est-à-dire, «  Je ne suis point de ceux qui lisent ». Ce n'est qu'au bout de la troisième fois qu'il a compris que l'ange lui ordonnait de répéter, de prononcer à haute voix ce qui allait lui être récité, ce qui est une autre signification du terme « Lis ». C'est ce qu'il fit alors. Ainsi donc, le Prophète déclare lui-même qu'il ne sait pas lire (« sallâllâhou alayhi wa salam »).


Le deuxième hadith


Pour étayer cet avis, prenons les propos relatés par Ismaël Ibn Kathir dans « Al-Sira An-Nabawiyya » (éditions UNIVERSEL, p.247-248).

La réponse du Prophète (saws), « Je ne sais pas lire », implique la négation, à savoir que celui-ci ne savait ni lire ni écrire. C'est là l'avis d'Ennawaoui et, avant lui, du cheikh Abou Châma.

Quant à ceux qui ont soutenu que cette réponse était une interrogation, leur avis est loin d'être juste. Ce qui confirme cette idée est le hadith rapporté par Abou Nu'aïm, d'après El-Mo'tamir Ibn Sulaïmane, qui lui-même rapportait les paroles de son père qui a dit :
« Le Messager d'Allah (saws) a dit, tout en tremblant : « Je n'ai jamais lu de livre et je ne peux pas le faire ! Je ne sais ni écrire ni lire ! » Gabriel (as) le prit alors et l'étouffa vigoureusement, puis le laissa et lui dit : « Lis ! » Mohammed (saws) lui répondit alors : « Je ne vois rien à lire, je ne sais pas lire et je ne sais pas écrire »»

                       (
Abou Nu'aïm, d'après El-Mo'tamir Ibn Sulaïmane)




Le troisième Hadith


Il a été relaté ceci sous l'autorité de Bara :

« Quand le Prophète (La paix soit sur lui) fut empêché de se rendre à la Ka'ba, les gens de La Mecque ont fait la paix avec lui, à la condition qu'il serait autorisé à entrer à La Mecque (l'année prochaine) et d'y rester pendant trois jours, qu'il n'entrerait pas (dans la ville), excepté avec des épées dans leurs fourreaux et des armes recouvertes dans leurs couvertures, qu'il ne prendrait pas avec lui aucun de ses habitants, ni qu'il empêcherait n'importe qui de ceux qui sont avec lui de rester à La Mecque (s'il le désiraient).

Il a dit à 'Ali : « Ecrit les termes convenus entre nous. ».
Ainsi 'Ali a écrit : « Au nom d'Allah, le miséricordieux, le Très miséricordieux. Ceci est ce que Muhammad, le messager d'Allah, a convenu (avec les Mecquois) ».
Les polythéistes lui ont dit : « Si nous savions que tu étais le messager de d'Allah, nous te suivrions, mais écrit : Muhammad B. 'Abdullah ».Ainsi il a dit à 'Ali d'effacer ces mots.
'Ali a dit : « Non, par Allah, je ne les effacerai pas ».

Le Messager d'Allah (la paix soit sur lui) dit : « Montre moi l'endroit (sur le parchemin) ».Ainsi il ('Ali) lui a montré l'endroit et le saint prophète l'a effacé.
'Ali a écrit : « Ibn 'Abdullah ».(Selon les termes du traité de l'année suivante) le Saint Prophète (la paix soit sur lui) est resté là pendant trois jours. Lorsque ce fut le troisième jour, ils ont dit à 'Ali : « C'est le dernier jour selon les termes de ton compagnon. Donc dis lui de partir. » 'Ali a informé le prophète (puisse la Paix être sur lui) en conséquence. Il a dit : « Oui », et quitta (la ville).
 »
(propos rapportés par Muslim)



            Le traité d’Al Hudaybiyah, sur lequel nous reviendrons est souvent cité en référence. Ici, 'Ali lui montre clairement l'endroit qu'il doit effacer ; ce qui prouve au moins que durant sa 18e année prophétique, il ne savait ni lire ni écrire. En effet, pour distinguer ce qu'il devait effacer, Ali a du le lui montrer clairement.



Retour au texte sacré


Dieu dit dans le Coran :
« Ceux qui suivent le Messager, le Prophète illettré, qu'ils trouvent écrit (mentionné) chez eux dans la Thora et l'Evangile. Il leur ordonne le convenable, leur défend le blâmable, leur rend licites les bonnes choses, leur interdit les mauvaises, et leur ôte le fardeau et les jougs qui étaient sur eux. Ceux qui croiront en lui, le soutiendront, lui porteront secours et suivront la lumière descendue avec lui ; ceux-là seront les gagnants. Dis : « Ô hommes ! Je suis pour vous tous le Messager de Dieu, à Qui appartient la royauté des cieux et de la terre. Pas de divinité à part Lui. Il donne la vie et Il donne la mort. Croyez donc en Dieu, en Son messager,le Prophète illettré qui croit en Dieu et en Ses paroles. Et suivez-le afin que vous soyez bien guidés ». »  
 (Coran, 7 /157)


Comme le dit Muhammad Mohar Alî dans son livre, The Biography of the Prophet and the Orientalists (p. 686): « Pour n'importe quel historien impartial, le Coran doit être considéré comme la première et la plus contemporaine source d'information sur la vie et les enseignements du Prophète.

 »

Pour certains orientalistes comme Maxime Robinson ou Montgomerry Watt, cette mention « ar-rassûl an-nabiyy al-ummiyy », soulignant l'illettrisme du Prophète, relève de l'invention apologétique tardive visant à hausser la valeur littéraire du Coran. Selon eux, « Ummy » désigne un Prophète de souche non-israélite (gentil) ou ne possédant pas d'écritures. Pourtant, cette compréhension ne date pas d'hier et les exégètes traditionnelles ne contestent pas se sens naturel. En effet, Ibn Abbâs a dit:
« Votre Prophète (bénédiction et salut soient sur lui) fut analphabète ne sachant ni lire ni écrire, ni calculer »
                                     (
Tafsîr Al-Qurtubî, 7/157)

Également, At-Tabarî note le sens du verset :
« Le Prophète (saws) ne savait pas écrire. » (
Tafsîr Al-Qurtubî, 7/157) 

Cependant c'est vrai, il y aussi, des savants musulmans anciens ou contemporains qui pensent que ce terme a été utilisé figurativement (cf. Ibn Hishâm II, al-Mawdudî, Tahfîm al-Qour'aane, (ed. Tadmurî), p.220). Quant à lui, l'orientaliste Montgomerry Watt pense que le mot « ummiyy » est dérivé de la phrase Hébreu, « ummot hâ 'olâm » (littéralement « les gens du monde des gentils »). Cela a pu avoir été le cas, mais il y a un avis plus pertinent à connaître : il serait dérivé de l'Arabe « umm » (mère) et par conséquent, « ummiyy » signifie « celui qui n'a pas acquis de connaissance, excepté ce qu'il a reçu de sa mère au berceau ».

Dans toutes les langues, les mots peuvent être utilisés à la fois littéralement et figurativement, à l'image des Grecs qualifiant de barbares aussi bien les cultures peu développées que l'ensemble des non-Grecs (non-Hellénistiques) ou des Hindous appelant « Yavana » non seulement les non-Aryens mais aussi l'ensemble des non-Hindous. 

Ainsi, pour ce qui est de l'utilisation du terme « ummy » dans le Coran, en plusieurs endroits (7/157-158, 2/78, 3/20, 3/75, 62/2), il faut prendre en considération le contexte pour tenter de déterminer de quelle façon, il a été utilisé.

En 2/78 du Coran, par exemple, il est indéniable qu'il est utilisé dans le sens de « illettré » (« ummiyyûn »). Le contexte nous montre que ce sont les Juifs qui sont désignés, et cela en constitue la preuve irréfragable. Dans le cas contraire, les traductions suivantes seraient dénuées de sens : 
« Et il y a parmi eux (les juifs) des non-juifs/ou des gens sans Livre (« ummiyyûn ») qui ne savent rien du Livre.

 » (2/78)
« Il est Celui qui a envoyé chez les illettrés (« ummiyyûn ») un messager issu d'eux-mêmes, qui leur récite Ses signes, les purifie et leur enseigne le Livre et la sagesse. » (62/2)


Conclusion


Le sens est ce qui est le plus disputé. Ainsi, pour Muhammad Hamidullâh, dans l’introduction de Sahifa Hammâm ibn Munabbih, (volume édité par l'Association des Etudiants Islamiques de France), le terme peut désigner simultanément des « non-juifs », c’est-à-dire, des « gens n'ayant pas hérité d'écritures d'essences divines » ou bien des « illettrés » (car la plupart des arabes du Hedjâz n'était pas lettrés).

Ce constat d'illettrisme est d'ailleurs confirmé par le verset 29/48: 
« Avant le Coran tu ne (pouvais) lire aucun livre, ni tracer (une ligne) de ta dextre, car alors les négateurs auraient été pris de soupçon. » 
Al-Qurtubî écrit :
« Des avis disent que le Prophète (saws) pouvait très peu écrire, mais ce qui est authentique c'est que le Prophète (saws) n'a pas écrit, même pas une lettre, mais il a dicté. Il ne lisait pas non plus. »
                                    (
Tafsîr Al-Qurtubî, 29/48)



Il est clair que la déclaration a été émise dans un contexte d'allégations récurrentes des mécréants comme quoi le Prophète aurait lui-même fabriqué ce qu'il communiquait et présentait comme issue d'une révélation divine. Le verset, de façon laconique, expose l'absurdité de cette allégation en signalant classiquement le fait indiscutable pour tout Mecquois de cette époque que le Prophète (PSL), n'avait pas pour habitude, précédemment, de lire ou d'écrire, donc il lui était impossible de venir soudainement avec une production littéraire remarquable et la présenter comme une révélation d'Allâh.

L'implication est plus que claire à partir de la dernière clause de la déclaration qui dit : « car alors les négateurs auraient été pris de soupçon » (29/48). Il est également utile de noter que l'expression « ma kunta » implique le fait d'être « non-habitué » ou « incapable de lire et écrire ».

De la même manière, la forme indéfinie avec laquelle le mot « Kitâb » a été utilisé signifie clairement « aucun Livre », et non pas « le Livre », qui est la forme avec laquelle le Coran se réfère aux écritures judéo/chrétiennes.





Yathrib786

8 February 2017


Ces références sont tirées du texte de Moussa Youssouf, Islampaix, avec  quelques ajouts personnels de Yathrib786.